vendredi 29 janvier 2010

1 – L'arrivée

A l'heure où j'écris, cela fait quatre jours déjà depuis que nous sommes arrivés à Kinshasa. Je ne vais pas pouvoir tout raconter ; il y en a déjà trop. Comme il y a quatre ans lorsque nous étions arrivés à Madras, c'est le déluge. De sensations, de couleurs, de mouvement, de goûts et de dégoûts, d'images et d'odeurs. Je m'en excuse d'avance auprès de vous : je vais devoir résumer.

La première chose qui frappe lorsqu'on traverse l'Afrique en avion, c'est le Sahara. Alors que l'on met à peine une heure pour parvenir à la Méditerranée, la traversée du désert en dure plus de trois. Les étendues de sable jaune d'or à perte de vue, écrasées de soleil sous le ciel d'un bleu profond, sont étrangement tristes à contempler. Au-dessus de cette immensité monotone, même vu de si haut, on se sent petit et désarmé ; j'ai passé le voyage à prier pour qu'on ne s'écrase pas dans cet enfer. De temps à autre, un petit village dont on ne comprend pas la présence rompt la routine. On ne voit pas bien de quoi vivent ses habitants. Peut-être ils se nourrissent de sable et boivent du vent.

Après cela, on se dit que les vastes forêts du Congo vont faire plaisir à voir. Eh bien pas du tout : une brume dense recouvre tout, on se trouve perdu quelque part entre du rien gris-bleu et le ciel bleu-gris. On flotte dans le néant. C'est un rien vertigineux et beaucoup moins intéressant.

Mais en arrivant sur Kinshasa sous un soleil couchant rouge sombre, on aperçoit enfin le Congo. Mel et moi avions cru, en descendant le Danube cet été sur nos vélos, être aux prises avec un grand fleuve. Ha! À côté du grand Congo, le Danube n'est qu'un mince filet d'eau de boudin. Colossal, lisse, majestueux, le Congo déroule de paresseux anneaux brun clair dans la plaine comme un boa endormi. Il enfle au niveau de Kinshasa et Brazzaville pour former comme une grande piscine, au milieu de laquelle vous regardent des îles agglomérées en forme d'oeil. C'est saisissant. Que l'on soit religieux ou pas, on a une sensation de sacré. C'est probablement un de ces endroits où la Création gagne une majuscule.

Bon, après l'atterrissage, on redevient un petit être sur deux pattes culminant à 1.8m, et qui espère qu'on ne va pas lui piquer son passeport à la douane. Mais l'arrivée est belle.

Je dis ça parce qu'on a piqué son passeport à Mélanie à l'immigration. Nous avons dû attendre une petite heure que le « protocole » (un albinos à casquette et lunettes de soleil chargé par mon employeur de nous réceptionner à l'aéroport, de récupérer nos bagages, et de retrouver les passeports qui disparaissent jusqu'à ce que bakchich s'ensuive) nous sorte de là.

La route qui nous ramène de l'aéroport est, euh, sombre. Rues noires et défoncées, sans éclairage public ni panneaux. Poussière. Ombres qui galopent dans les phares pour traverser la rue. Terrasses de bistrots mal éclairée. Façades basses, peintes aux couleurs d'une des deux marques de bière locales (Primus et Skol, on y reviendra peut-être).

Deux heures plus tard, nous mettons les pieds dans notre appartement. Il est grand ; il est climatisé ; le frigo est plein (pour une raison que j'ignore, il est surtout plein de pain). Enfin, il est décoré avec un goût discutable, comme en témoignent les dessus-de-lit à froufrous en simili-soie qui couvrent les plumards des deux chambres : un rose bonbon et un bleu lagon. Dans la pièce mitoyenne, les canapés d'un vert évoquant le caca d'herbivore offrent un contraste intéressant avec ce mauvais goût pastel. A part ça, on y est vraiment bien.

On y accède en passant un barrage de militaires. Assis toute la journée sur des chaises en plastique sur le côté de leur barrière rouge et blanche, ils glandouillent paisiblement avec leur Kalachnikov sur les genoux. Ils sourient et parlent peu ; je ne les aime pas trop.

Comme le dit au boulot le très sage Aristide Dabiré, « Trop de sécuwité tue la sécuwité ». Il a raison. On reparlera sûrement de lui plus tard.

Mais pour la galerie de portraits il vous faudra attendre mes agneaux, car le devoir m'appelle. Les notes sont prises pour les prochaines mises à jour, je tâcherai de ne pas tarder si ces premiers paragraphes vous plaisent.

A bientôt !

11 commentaires:

  1. Je lis pas bcp de roman en ce moment mais j'ai bien fait de commencer celui-la!
    We want mowe !
    Augustin

    RépondreSupprimer
  2. C'est d'la balle.Encowe!Encowe!ca va êtwe bien de te liwe.vivement la suite!

    RépondreSupprimer
  3. Merci pour ce début d'histoire.
    Saluez les fantômes de ma part...

    RépondreSupprimer
  4. wouhou!
    Ca démarre fort!
    Ton ton haut en couleurs peint bien les contours de cette nouvelle aventure...
    A défaut de photos de kinshasa, une photo du canapé couleur caca d'herbivore??

    Une grosse bise et vivement la suite

    RépondreSupprimer
  5. En effet, ça met de bonne humeur pour la semaine... On a hâte d'en savoir plus sur tous les sujets ouverts et remis à plus tard. Avez-vous pu venir à bout du pain ??
    Bises

    RépondreSupprimer
  6. Avec un flux rss pour les geeks :)

    RépondreSupprimer
  7. YES j'attendais ça avec impatience et voilà on y est, au milieu du stress parisien sous une pluie de paperasse et une bruine glaciale : un clic et hop me voilà partie en Afrique dans un coin de votre valise coincée entre 2 bouquins Merci merci pour ce petit souffle chaud, pour cette bouffée d'évasion et aussi pour ce petit ricanement intérieur que je ne peux réprimer en vous lisant.Vivement la suite. Je jette ma crêpe en l'air à votre aventure. Plein de bisous

    RépondreSupprimer
  8. On est bienheureux de te lire, de savoir, de partager, de rêver, mais quand-même faut pas déconner.
    Permettez que le Cémajuscule que gagna la création, je m'assoye dessue pour en parer mon Cule.
    N'allez pas accroire, cher chroniqueur au verbe haut, qu'on va vous laisser vous envoler lyrique à coups de propablement.
    N'oubliez pas, d'ailleurs, ce qu'évoque à Toto le probablement : chier dans le piano.

    Trillions of anagawané poponé in your face, and a kiss on the f...ing nose.

    RépondreSupprimer
  9. Quel bonheur de se retrouver en Afrique en rentrant chez soi.
    Parlez nous un peu des odeurs, des senteurs de la cuisine...
    Bon, j'ai hâte de lire le prochain article.

    RépondreSupprimer
  10. merci de nous faire voyager, j'attends la suite avec impatience !
    bises

    RépondreSupprimer
  11. Tu résumes bien. Merci !
    Alice

    RépondreSupprimer